Il y a à peine quelques semaines, nous mettions en ligne sur ce blog un article traitant du sujet de l’abandon de poste : de quoi il s’agissait, quelles étaient les conséquences pour l’employé et comment l’employeur devait-il réagir face à ce phénomène. Un article dont le contenu se doit (déjà) d’être actualisé suite à la nouvelle réforme de l’assurance chômage, qui entrera en vigueur dans les jours à venir (1er février 2023). En effet, cette reforme prévoit plusieurs changements concernant les droits au chômage dans le cas d’un abandon de poste.
Maître Reix, avocat au barreau de Limoges depuis plus de 10 ans, vous explique tout cela en détail.
L’abandon de poste : comment le définir ?
Chose assez insolite pour être soulignée : la loi ne définit pas l’abandon de poste, celui-ci vient d’une création prétorienne. En pratique, un abandon de poste concerne un salarié qui quitte son poste de travail sans l’autorisation de son employeur, ou qui s’absente sans justificatif pendant ses heures de travail. Nous vous indiquions ainsi dans notre précédent article sur le sujet :
« Si un salarié quitte son poste de travail sans autorisation de son employeur, ou s’absente pendant ses heures de travail de manière prolongée ou répétée sans justificatif, cela peut être considéré comme un abandon de poste. Un salarié dispose toutefois d’un délai de 48 heures pour avertir son employeur en cas d’arrêt maladie. L’entreprise doit donc patienter au minimum deux jours pour être certaine que l’employé est en abandon de poste et n’est pas en arrêt maladie.«
La notion de répétitivité est évidemment importante dans le cas d’un abandon de poste, puisqu’une seule récurrence exceptionnelle ne peut être considérée comme un véritable abandon de poste.
La nouvelle réforme de l’assurance chômage ne modifiant aucunement la définition théorique de l’abandon de poste, passons directement sur ce qui va changer dès le 1er février 2023.
Employé « présumé démissionnaire »
Selon une jurisprudence jusque-là constante de la Cour de cassation, l’abandon de poste sans justification ni explication ne caractérisait pas la volonté claire et non équivoque du salarié de démissionner. Cela signifiait ainsi que l’employé concerné restait sous contrat avec son employeur jusqu’à ce qu’une décision officielle vienne y mettre fin, comme un licenciement par exemple. Ceci permettait ainsi à l’employé de pouvoir toucher les éventuelles indemnisations par Pôle Emploi auquel il aurait eu droit dans ce cas de figure.
Or, le nouvel article L1237-1-1 du Code du travail dispose que :
« Le salarié qui a abandonné volontairement son poste et ne reprend pas le travail après avoir été mis en demeure à cette fin, par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge, est présumé démissionnaire. Le salarié qui conteste la rupture de son contrat de travail sur le fondement de cette présomption peut saisir le Conseil de prud’hommes.
L’affaire est directement portée devant le bureau de jugement, qui se prononce sur la nature de la rupture et les conséquences associées. Il statue au fond dans un délai d’un mois à compter de sa saisine. Un décret en conseil d’État détermine les modalités d’exécution du présent article. »
Pour résumé, le salarié qui abandonne son poste serait désormais « présumé démissionnaire » le législateur mettant fin à la jurisprudence précitée en instituant une nouvelle présomption de démission en cas d’abandon de poste. Cela aura notamment des conséquences directes sur son droit aux allocations-chômage, qu’il ne pourra pas toucher puisque la démission est considérée comme une privation volontaire d’emploi.
Avant / Après
AVANT
L’abandon de poste n’est pas synonyme de démission mais d’absence injustifiée. L’employeur sans nouvelle de son salarié dans un délai de deux à quatre jours peut adresser une lettre de mise en demeure par courrier recommandé pour demander au salarié de justifier de son absence. Sans réponse de la part du salarié, l’employeur peut enclencher une procédure de licenciement pour cause réelle et sérieuse. Une fois licencié, le salarié peut faire valoir son droit au chômage.
DÉSORMAIS (à partir du 01/02/23)
Le salarié qui abandonne son poste est présumé démissionnaire. Cela entraîne automatiquement la suppression des droits aux allocations-chômage. Le salarié peut contester la rupture de son contrat de travail et renverser la présomption de démission. L’employeur doit donc bien réfléchir car s’il perd, il sera condamné pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Les questions soulevées par cette réforme
La mise en œuvre de cette nouvelle présomption soulève néanmoins plusieurs questions, dont les deux principales sont :
- quid du préavis de démission ?
- l’employeur pourra-t-il invoquer le comportement fautif du salarié pour le licencier pour faute ?
Les dispositions précitées n’entreront en vigueur qu’après la publication du décret d’application qui prévoira les modalités pratiques d’application du texte. De nouveaux détails, dont la réponse aux nombreuses questions que vous pouvez vous poser, seront donc disséminés ici et là.
Maître Reix se fera ainsi une joie de vous conseiller, vous aiguiller et de répondre à toutes vos questions sur ce sujet, qui a fait l’actualité de ces dernières semaines. Pour tout autre sujet relevant du droit du travail, n’hésitez pas non plus à contacter notre cabinet : nous avons fait de cette branche du droit notre activité principale, et accompagnons ainsi employés comme employeurs pour faire valoir leurs droits face à la justice. Pour cela, prenez rendez-vous directement en ligne ou appelez-nous par téléphone au 09 87 16 45 05.